Nouvelle atteinte aux libertés fondamentales - Hadjadj arrêté à Constantine

Djilali Hadjadj, président de l’Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC) et représentant en Algérie de l’ONG Transparency International, a été interpellé vers 17 h aujourd'hui à l'aéroport de Constantine alors qu'il se préparait à s'envoler vers la France dans un avion d'Air Algérie.

Selon son épouse, interrogée par TSA, les policiers n'auraient fourni aucune explication du mandat d'arrêt à l'inculpé.

L'on sait seulement qu'il a mis en doute la semaine dernière, dans des déclarations à la presse nationale, les dispositions des pouvoirs publics à lutter réellement contre la corruption devenue un véritable fléau dans le pays.

On indique par ailleurs que Hadjadjl sera présenté demain devant le procureur de la République de Constantine pour s'entendre notifier les griefs retenus contre lui.

Cette affaire va devoir encore interpeller les organisations internationales pour venir à la rescousse de l'un de leurs membres activant légalement contre la corruption en Algérie. A coup sûr, les pouvoirs publics seront de nouveau placés sur la sellette et fustigés pour les débordements dont ils ne cessent toujours pas de se signaler malgré les rappels à l'ordre que l'ONU, pour ne citer qu'elle, leur adresse régulièrement.

Les motifs de cette arrestation ont été révélés dans la nuit et n'ont strictement rien à voir avec les activités militantes contre la corruption de l'intéressé sous la bannière de Transparency International.

Hadjadj faisait l'objet de poursuites à caractère privé lancées par la CNAS (Caisse de sécurité sociale) d'Alger, où il avait été employé dans le passé.

Ayant passé la nuit dernière derrière les barreaux, il doit en principe être acheminé dès ce matin dans la capitale où il sera déféré devant le juge d'instruction, auteur du mandat d'arrêt émis contre lui, faute par Hadjadj de n'avoir pas obtempéré aux nombreuses convocations dont il était destinataire.

Djilali Hadjadj reste toujours entre les mains de la justice de Constantine qui a prévu, en principe, de le faire transférer dès ce soir sur Alger, où l'attend le juge d'instruction du tribunal de Sidi-M'hamed.

En fait, ce n'est pas la CNAS qui aurait émis des poursuites contre lui mais le ministre du Travail, Tayeb Louh, l'homme que le régime de Bouteflika semble affectionner pour accomplir ses basses œuvres, nous apprend le site Lematin.dz de Benchicou.

La LADDH (Ligue algérienne de défense des droits de l'homme), qui a confirmé l'origine du dépôt de plainte, suit apparemment de près l'affaire de cette arrestation devenue aussi curieuse que préoccupante en ce qu'elle touche aux droits fondamentaux du citoyen, puisque le délai de garde à vue a déjà expiré.

Le Soir d'Algérie a publié ce matin l'interview que lui a accordée l'avocat de l'intéressé, Me Chamma.

Hadjadj est donc incarcéré à Serkadji depuis hier, apprend-on par ailleurs.

Son arrestation est liée, semble-t-il, à une banale histoire de certificats médicaux qu'il aurait délivrés comme médecin et que la justice aurait contesté l'authenticité ou quelque chose d'approchant.

Voici en tout cas l'interview telle que publiée par le quotidien précité.

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Me Chamma : une banale histoire de certificats médicaux

Le transfert de Djilali Hadjadj, interpellé dimanche après-midi à l’aéroport de Constantine, en exécution d’un mandat d’arrêt, a été entrepris hier à la mi-journée. Les Sûretés de daïra de Constantine et d’Alger devaient se relayer pour effectuer ce transfert.

Entre-temps, Me Smaïn Chamma qui assure sa défense en compagnie de Me Miloud Brahimi, a eu accès au dossier. Il assure que ce qui est reproché à son mandant est loin d’être ce à quoi pouvaient renvoyer les deux chefs d’inculpation mentionnés dans le mandat d’arrêt. Il en parle.

Le Soir d’Algérie : Vous avez certainement accédé au dossier de votre mandant. En quoi tient cette affaire qui lui a valu un mandat d’arrêt et une interpellation ?

Me Smaïn Chamma : Dans cette affaire, s’agit, en fait, de trois certificats médicaux que Djilali Hadjadj a, en sa qualité de médecin, délivrés à une patiente, laquelle se trouve être son épouse. Des certificats délivrés, il est utile de le mentionner, pour la constitution de dossiers descriptifs, son épouse étant fonctionnaire. En somme, tout ce qu’il y a d’ordinaire. Aussi l’on est loin du faux et usage de faux, et encore de la dilapidation de deniers publics, comme mentionné dans le mandat d’arrêt.

Y a-t-il un jugement rendu dans cette affaire ?

En effet, il y a eu un jugement rendu par défaut le mois de mai 2010. Mon client était absent lorsque l’affaire a été jugée. Il se trouvait à l’étranger. Ce jugement par défaut le condamne à une peine de trois ans de prison ferme et à une amende.

C’est, donc, après ce jugement par défaut que le mandat d’arrêt a été émis ?

Justement, non. Le jugement rendu ne fait aucunement mention du mandat d’arrêt. Le mandat d’arrêt est antérieur au jugement. Il a été émis par le juge d’instruction trois mois auparavant, soit vers février. En tout cas, le mandat d’arrêt a été ventilé au mois de mars 2010, c'est-à-dire deux mois avant que l’affaire ne soit jugée par défaut. Il faudra peut-être signaler que Djilali Hadjadj est rentré de l’étranger au mois de juin sans qu’il fasse l’objet d’interpellation, alors que le mandat d’arrêt avait déjà été ventilé.

Djilali Hadjadj savait-il que la Cnas avait porté plainte contre lui ?

Contrairement à ce qui a pu être dit et écrit ici et là, il ne s’agit nullement d’une plainte déposée par la Cnas. Cette dernière n’est même pas partie civile dans l’affaire. Il s’agit d’une autosaisine du procureur de la République.

Et sur quel base, à votre avis ?

Ce que l’on sait, c’est qu’il y a quelques années de cela, en 2006, je crois, mon client a été convoqué par la police, et il s’était rendu au Commissariat central pour être entendu sur cette histoire de certificats médicaux. Etant médecin, il a affirmé qu’il avait bel et bien établi les documents et que c’était bien sa griffe en bas des certificats et que, donc, il ne s’agit aucunement de faux. Mais, après cela, il n’a reçu aucune convocation du tribunal.

Qu’en est-il du transfert de votre client sur Alger ?

La procédure de transfert a été entamée hier à la mi-journée. Nous souhaitons que cela ne traîne pas pour que mon client puisse être présenté devant le procureur et le juge de siège avant les fêtes de l’Aid et le week-end.
Comment votre client vit-il cette épreuve ?

Il se porte bien, il a le moral. En témoignent d’ailleurs les membres de sa famille, dont son frère (présent au moment de l’entretien, ndlr). Leur seule inquiétude est que le transfert traîne. Sinon ils tiennent à saluer l’attitude des policiers de Constantine qui se sont comportés correctement avec Djilali Hadjadj et l’ont mis à l’aise. Ils tiennent aussi à saluer le large élan de solidarité qui s’est organisée en faveur de Djilali Hadjadj, que ce soit au niveau national qu’international.
Entretien réalisé par Sofiane Aït-Iflis

Djilali Hadjadj a été jugé, pour "faux, usage de faux et dilapidation" aujourd'hui par le tribunal de Sidi M'hamed à Alger et a écopé de 6 mois de prison avec sursis et d'une amende. Son épouse a été également condamnée à 2 mois de prison avec sursis. Il a donc été libéré ce soir.

Le couple était impliqué dans une sombre affaire d'ordonnances médicales de la clinique de Beau-Fraisier à Alger, où 3 cadres étaient également poursuivis. Les tenants et aboutissants de ce procès n'ont pas été suffisamment clarifiés, dans la dépêche de TSA qui relate l'information, pour pouvoir être rapportés ici.

Il a été révélé, enfin, qu'une première condamnation par contumace avait été prononcée contre Hadjadj en mai dernier, d'où son arrestation à l'aéroport au moment de son départ vers Marseille, la semaine dernière.