Deux cas précis révélés coup sur coup, aujourd'hui, mettent en lumière les atteintes caractérisées des gouvernants algériens aux droits de l'homme d'une part et à la liberté d'expression, de l'autre.
Le premier concerne un homme que l'on a battu à mort, dans un commissariat de police à Saïda. Arrêté à la suite d'une altercation avec un automobiliste qui l'avait heurté avec son véhicule, le malheureux a eu le coup de grâce dans les locaux de la police. Le plus grave est que les lâches qui ont mis fin à ses jours n'ont même pas eu le courage de signer leur acte, en refusant d'indiquer les causes exactes de sa mort sur la déclaration de décès. L'organisation pour la défense des droits de l'homme, saisie par la famille du défunt, a déjà pris attache avec le ministère de la Justice pour exiger que la lumière soit faite sur ce crime aussi condamnable qu'inacceptable.
Le deuxième porte sur le contrôle abusif des publications. La ministre de la Culture en fonction, certainement sur ordre de ses supérieurs, a poussé le ridicule jusqu'à mettre en place un système de censure n'ayant d'égal que celui de l'empire soviétique de triste mémoire. Cette censure, rigoureusement appliquée déjà en matière de publications écrites, s'étend désormais au cinéma. L'article publié par TSA aujourd'hui même en donne suffisamment de détails. Le voici :
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Retour inquiétant de la censure dans le cinéma en Algérie
Merouane Mokdad
Le ministère de la Culture vient de proposer au cinéaste Ahmed Rachedi de remanier son scénario sur Krim Belkacem. Cette demande a été formulée après dix huit de mois de blocage. Dans un premier temps, le département de Khalida Toumi avait exigé du cinéaste de faire lire son scénario par le ministère des Moujahidine. Ces réserves s’expliquent par le fait que dans cette œuvre biographique, le réalisateur revient sur les conditions troubles de l’assassinat de ce chef historique de la guerre de libération à Francfort, en Allemagne, le 18 octobre 1970.
« Ben Boulaïd », autre film de Ahmed Rachedi, est frappé par une censure qui ne dit pas son nom. Projeté seulement deux ou trois fois à Alger et à Oran au moment de sa sortie l'année dernière, ce long métrage n’a ensuite jamais plus été présents dans les salles. Autant dire que le grand public n’a pas encore vu ce film que le président Abdelaziz Bouteflika a ouvertement critiqué.
En Algérie, il y a aussi cette tendance à penser que le cinéma peut écrire l’histoire et que les cinéastes doivent s’en tenir aux versions officielles de cette même histoire. Evoqué à plusieurs reprises par des hauts responsables, un projet de film sur l’Emir Abdelkader, considéré comme le fondateur de l’Etat algérien, n’a toujours pas trouvé preneur. Récemment, Rachid Bouchareb, réalisateur de « Hors la loi », a laissé entendre qu’il était intéressé par ce projet. Ces derniers mois, plusieurs films n’ont pas eu le visa d’exploitation en salle de la part du ministère de la Culture. Il s’agit, entre autre, de « Délice paloma » de Nadir Mokhnèche et de « La Chine est encore loin » de Malek Bensmaïl. Pour ce dernier film, Khalida Toumi a soutenu que le producteur n’a pas déposé de demande de visa d’exploitation.
Amina Bachir Chouikh, qui a réalisé le célèbre film « Rachida », trouve elle aussi des difficultés avec le ministère de la Culture. Elle peine à avoir le visa d’exploitation pour un documentaire sur les femmes et la guerre de libération nationale. Inspiré de l’œuvre de Yasmina Khadra, « Morituri » de Okacha Touita, sorti en 2007, est absent des salles. Il n’a été vu qu’une seule fois à Alger, lors de l’avant-première !