La baisse de production annoncée par l'OPEP ou le coup d'épée dans l'eau

Réunie à Vienne (Autriche) aujourd'hui, l'organisation des producteurs de pétrole OPEP a décidé de réduire la production, dès le 1er novembre prochain, de 1,5 million de barils par jour. Les nouveaux quotas par pays membre ont été donc définis, sauf pour l'Irak encore sous occupation étrangère.

L'OPEP espère ainsi contrecarrer la pression à la baisse qui s'exerce depuis quelques semaines sur le prix du brut, faisant chuter de 147 $ à la mi-juillet dernier à 61 $ sa cote aujourd'hui à la bourse de Londres.

Pourtant, au lieu d'enregistrer un relèvement de prix qu'implique semblable décision, les places financières ont réagi inversement. Entre hier et aujourd'hui, une perte sèche de 4 $ a marqué le marché pétrolier, puisque de 65 $ le baril est descendu à 61 $.

En vérité, les dernières publications de résultats trimestriels par les principales compagnies internationales activant notamment dans l'automobile, jointes à l'annonce de plus en plus insistante de la récession dans les grands pays industriels, pèsent désormais lourdement sur l'économie mondiale. L'avenir se trouve du coup franchement hypothéqué au point où l'on se demande sur quels leviers agir pour ramener le calme au niveau des bourses mondiales et pour relancer l'activité industrielle.

Les Algériens semblent être les premiers à faire dans leur froc, à l'annonce de la chute persistante du prix du pétrole.

En moins de trois mois, ce qui apparaissait subitement comme une aubaine, permettant de former maints projets destinés essentiellement à montrer sous un faux jour l'Algérie de Bouteflika, devient subitement un cadeau empoisonné, qui risque de compromettre le futur immédiat du pays. Le pétrole dégringole de 147 $ en juillet à 61 $ aujourd'hui.

Le régime doit, du coup, déchanter et surtout renoncer à ses investissements bidon, comme celui de la Mosquée d'Alger, qu'il ne pourra désormais financer sans recourir aux prêts internationaux. Le maigre pactole constitué ces derniers années, grâce au renchérissement du prix du pétrole, va fondre rapidement, comme neige au soleil. Car, les engagements pris, notamment en matière de renouvellement de l'armement, ne peuvent être annulés, les fournisseurs ayant mis en chantier les commandes engagées.

De plus, les Algériens, habitués qu'ils sont désormais à vivre au-dessus de leurs moyens, en s'offrant des véhicules et autres gadgets de luxe, devront encore une fois se serrer la ceinture. Plus gravement encore, ils risquent de voir les médicaments manquer dans les étals de pharmacie, les produits alimentaires se raréfier. Bref, le temps des vaches maigres s'annonce, cette fois, avec les retombées incontrôlables que l'on puisse imaginer.

Et tout cela tombe concomitamment, au grand dam des thuriféraires du régime, avec les prochaines élections présidentielles. Sera-ce l'occasion rêvée de balayer en grand le régime maudit et ses suppôts ?

En fait, le marché ne pourra réagir à la réduction de la production de pétrole du cartel OPEP que dans un délai de deux mois environ. C'est le temps nécessaire que mettront les prochaines commandes pour être suivies d'effet. Les contrats sont habituellement conclus pour des livraisons à deux moins au moins de distance.

Cette décision de réduire de 1,5 million de barils par jour la production au niveau du cartel (ne contrôlant que 40 % de la production mondiale, faut-il le rappeler) a été perçue en tout cas fort négativement, à la fois par les USA et le Royaume Uni. Les deux pays s'accordent à considérer qu'elle survient à contresens des intérêts de l'économie mondiale. Sous l'effet de la crise financière internationale et de la récession qui frappe certains pays industriels, Washington et Londres estiment la décision prise comme "scandaleuse". Pour Gordon Brown, le Premier ministre britannique, il eût été préférable de laisser au marché le soin de réguler lui-même le prix du pétrole.

Cette dernière manifestation sonne à vrai dire bien faux avec l'esprit de la concurrence que les principaux pays industriels remettent eux-mêmes en cause. Par le dispositif de nationalisations ou recapitalisations qu'ils ont instauré ces dernières semaines pour venir au secours des banques menacées de faillite, ils ont porté en effet une atteinte grave à la règle applicable dans l'idéologie capitaliste. Le logique aurait voulu, pour répondre à l'approche keynésienne de l'offre et de la demande, que le marché décide seul du sort des banques et autres entreprises menacées de faillite. Peut-être qu'alors les pays producteurs de pétrole, aujourd'hui, de phosphate ou d'autre matière première, demain, accepteraient-ils, à leur tour, que le marché décide du sort également du pétrole, du phosphate ou de toute autre matière première indispensable à l'économie mondiale !