Crif : un dîner très politique

JDD.fr - 8.02.2012
par Vivien Vergnaud

Mercredi soir aura lieu le traditionnel dîner du Crif. Cette année, l'organisation communautaire invite notamment les parents du soldat Gilad Shalit, des responsables religieux mais aussi politiques. Nicolas Sarkozy prononcera un discours... devant François Hollande.


Nicolas Sarkozy et Richard Prasquier au diner du Crif en 2009

Un millier de convives, des ambassadeurs, des responsables religieux, la famille du soldat franco-israélien Gilad Shalit, le Premier ministre et des membres du gouvernement, le chef de l'État ainsi que le candidat en tête des sondages pour la présidentielle. Voilà l'impressionnante liste des invités du diner du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), qui se tient mercredi soir, à 20 heures, dans le pavillon d'Ermenonville au bois de Boulogne. Nicolas Sarkozy y prononcera, pour la troisième fois depuis 2007, un discours en tant qu'invité d'honneur.

Mais cette année, ses paroles, et la réunion en elle-même, auront une tonalité particulière. D'abord en raison de la polémique sur les propos de Claude Guéant sur les "civilisations". "Le ministre de l'Intérieur a dit que toutes les civilisations ne se valent pas, moi personnellement, je n'aurais pas utilisé le terme de civilisation, la civilisation est ensemble de choses très complexes, s'il parle de la civilisation occidentale, la civilisation occidentale a produit des choses merveilleuses mais elle en a produit des choses horribles", a déjà répondu le président du Crif Richard Prasquier sur France Info mercredi matin.

Le dîner sera également un événement particulier puisqu'il sera l'occasion de recevoir les parents de Gilad Shalit, ce soldat franco-israélien détenu pendant cinq années à Gaza et libéré en octobre dernier. Le jeune homme, lui, n'assistera pas au dîner, "son état de santé ne le permettant pas", selon des proches cités par l'AFP. Enfin, le rendez-vous annuel du Crif sera aussi exceptionnel en raison de l'approche de l'élection présidentielle.

Les parents de Shalit en invités

Nicolas Sarkozy a ainsi choisi de recevoir Gilad Shalit et ses parents ce mercredi matin à l'Élysée, ont indiqué les services de la présidence, toujours à l'AFP, avant la venue des seuls parents au dîner. Cependant, mardi soir, les responsables du groupe d'amitié France-Israël à l'Assemblée, son président Claude Goasguen (UMP) en tête, n'étaient pas au courant d'une telle invitation. "L'Élysée n'a pas besoin de donner une impulsion au Crif" pour organiser ce genre d'invitations, a expliqué au JDD.fr Jérôme Chartier, secrétaire du groupe. "Si cela se fait, c'est parce que le Crif l'a organisé et après en a parlé à l'Élysée", a continué de supputer le député UMP. Pourtant, contacté mardi par leJDD.fr, le Crif assurait ne "pas avoir d'informations" au sujet de la venue du soldat ou de sa famille au dîner.

Gilad Shalit reçu à l'Élysée :

Au-delà de cette venue symbolique, Nicolas Sarkozy pourrait profiter de son discours pour s'affirmer encore un [peu] plus comme candidat. En 2008, ses propos au même dîner avaient provoqué une polémique. Cette année, il sera scruté par François Hollande et sa compagne, conviés par le Crif. En outre, avant l'allocution du chef de l'État, le président du Conseil aura pris la parole et devrait parler de politique : populisme en Europe, présence de Marine Le Pen à un bal d'extrême-droite en Autriche, "montée des nationalismes, de la xénophobie et la persistance d'un antisémitisme important", a détaillé Richard Prasquier à l'AFP. Il rendra hommage à "l'énergie" du chef de l'État sur la scène européenne et à sa "lucidité" au sujet de l'Iran, dont il exige, avec la chancelière allemande, Angela Merkel, et le Premier ministre britannique, David Cameron, l'arrêt "immédiat" du programme nucléaire.

Un vote juif?

Mais il ne parlera pas de l'élection présidentielle. "Je ne donnerai aucune consigne de vote. S'il y a une sensibilité juive, elle doit s'écarter des extrêmes", a ajouté Richard Prasquier selon lequel "il y a des partis qui se sont mis au premier rang pour la délégitimisation d'Israël, ou pour son boycottage. C'est illégal et injuste. Il y a des lignes jaunes à ne pas franchir et il y aura des conséquences", a-t-il affirmé. Le président du Crif vise ainsi les partis des deux extrêmes (NPA, LO et FN), mais aussi Europe Écologie - Les Verts, puisque la formation d'Éva Joly est jugée active dans le boycott des produits israéliens.

Le responsable communautaire prendra soin de répéter qu'il n'y a "pas de vote juif" en France. En revanche, en Israël - où Nicolas Sarkozy est généralement perçu comme un "ami", même si certaines de ses positions, notamment son soutien à l'adhésion de la Palestine à l'Unesco en octobre dernier, ont été vivement critiquées - la communauté franco-israélienne (400.000 personnes environ) avait voté à plus de 85% pour lui en 2007. En France, il y aurait entre 500.000 et 600.000 Juifs.


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