Le président polonais meurt dans un accident d'avion

Tandis que la délégation polonaise de plus de 90 personnes, dirigée par le président Lech Kaczynski en personne, se rendait ce matin vers Katyn, un haut lieu historique où des milliers d'officiers polonais avaient été exécutés à la fin des années trente, sous le régime de Staline, son avion, un Tupolev 154 s'est écrasé au sol, en ratant son atterrissage.

L'ensemble des passagers, 97 dit-on, ont trouvé alors la mort, après avoir heurté la cime des arbres, faute de visibilité suffisante due au brouillard.

Selon les autorités de Moscou, puisque l'avion est tombé à Smolensk, en territoire russe, le pilote aurait fait une erreur de pilotage et se serait entêté à vouloir faire la quatrième tentative d'atterrissage, malgré les mises en garde des aiguilleurs. Il aurait également décliné l'offre d'aller rejoindre l'un ou l'autre des aéroports les plus proches.

Les médias se sont, bien sûr, empressés de mettre en exergue le peu de fiabilité de ce type d'aéronef de fabrication soviétique, mais les Polonais eux-mêmes ont rejeté immédiatement toute hypothèse tendant à imputer la catastrophe à la mauvaise qualité de l'appareil. Bien au contraire, réaffirment-ils, le Tupolev a été visité récemment et demeurait en parfait état de navigation.

Une semaine de deuil national a été décrétée en Pologne aussitôt. Et, dans ce sillage, Moscou a décidé d'une journée chez lui.

Des messages de condoléances affluent de toute part auprès du gouvernement et du peuple polonais qui se retrouve uni dans une circonstance aussi particulière.

Une certaine polémique commence à prendre corps à Varsovie à propos du lieu destiné à recevoir la dépouille de Lech Kaczynski, le président qui a trouvé la mort dans le crash de Smolensk avec 96 compatriotes.

Profitant de l'émotion considérable créée dans le pays à la suite de la catastrophe, le frère jumeau Jaroslaw, ex Premier ministre, fait pression sur le cardinal Stanislaw Dziwisz, archevêque de Cracovie, pour obtenir que les restes de Lech soient inhumés au château de Wawel. C'est dans ce dernier que les rois de Pologne ainsi que les illustres personnages de l'Etat ont trouvé place, en effet.

Or, si Jaroslaw Kaczynski, en agissant ainsi, prépare son propre terrain pour les prochaines élections présidentielles, la nomenklatura ainsi que les médias et les partis politiques partagent d'autant moins cette idée que le défunt n'aura en fait pas laissé d'empreinte particulièrement positive de son règne.

Mais, d'ici samedi, jour des obsèques, il reste bien peu de temps pour influer sur la décision finale.

L'avion présidentiel de Lech Kaczynski n'était pas assuré, semble-t-il. Du coup, c'est le gouvernement polonais qui se propose d'indemniser les familles de victimes à hauteur de 6 millions d'euros, à répartir entre elles.

D'autre part, l'analyse des boîtes noires n'avance aucune explication complète et cohérente du crash. On continue à supposer que le pilote, qui a raté son atterrissage, aurait reçu des injonctions du président lui-même exigeant qu'il atterrisse coûte que coûte, pour pouvoir rejoindre à temps les cérémonies prévues.

Or, un antécédent survenu en 2008, lors du voyage de Lech Kaczynski en Géorgie, au moment fort de son affrontement avec la Russie, rappelle que le président polonais aurait même menacé de licenciement le pilote qui refusait d'exécuter son ordre d'atterrir à Tbilissi.

Le drame est que Lech Kaczynski n'a pas payé seul de sa vie une décision aussi insensée que stupide, puisque 96 autres passagers ont été tués aussi dans le crash de Smolensk.