Le Gabon dans la tourmente

L'élection d'Ali Bongo, le fils du président défunt Omar Bongo, ne semble pas du tout acceptée au Gabon, où deux autres challengers revendiquent eux aussi la victoire.

Ali, 50 ans, aurait obtenu un peu plus de 41 % des suffrages exprimés, contre un peu moins de 26 % pour l'ancien ministre de l'Intérieur, André Mba Obame et 25 % pour Pierre Manboundou.

Les violences de la rue ont eu pour cible, depuis hier, la ville de Port Gentil ou les partisans des deux candidats malheureux s'en sont pris à un poste de police qu'ils ont incendié, à des magasins privés qu'ils ont pillés et enfin à la prison d'où ils ont libéré des détenus. Le plus remarquable est surtout le consulat général de France qu'ils ont mis en autodafé. Ils se seraient aussi attaqués à des installations pétrolières du groupe Total et de Schlumberger, où 3 femmes ont été blessées.

La capitale, Libreville, est pour l'instant calme, indiquent les agences de presse, même si elle est secouée de manifestations dirigées contre Bongo, mais aussi contre la France. "On en a marre des Français", tonnaient certains cris.

Les autorités françaises, comme d'habitude, s'estiment non concernées par les affaires intérieures du Gabon et observent une certaine attitude de neutralité. Elles ont certes appelé les ressortissants français à ne pas quitter leur domicile tant que les violences subsistent et s'apprêtent le cas échéant à protéger leur retraite. Paris dispose en effet, sur place, d'un régiment de soldats de la force d'intervention prêt à être mis en mouvement en cas de nécessité.

Pour la troisième journée consécutive, les émeutes à Port-Gentil, la deuxième ville du pays, se sont traduites par la mort d'au moins trois personnes, le sac des magasins, les incendies perpétrés dans certains locaux et la mise en place de barricades fermant la circulation aux véhicules de police.

Pour les candidats malchanceux, Ali Bongo n'a pas recueilli vraiment les suffrages qu'il revendique. Pour eux, exactement comme ailleurs dans le reste de l'Afrique, les résultats ont été trafiqués par les partisans d'Ali Bongo, sous le contrôle d'une administration bienveillante. Ce sont là, pour rappel, des accusations qui s'apparentent exactement aux griefs retenus contre Bouteflika, en Algérie.

Port-Gentil, qui est placé sous couvre-feu, reste donc coupé du monde : on ne peut ni y entrer ni en sortir. Cela pousse les autorités à y envisager l'instauration de l'état de siège. Mais, pour ce faire, elles ont besoin d'une autorisation du Parlement, lequel n'est pas encore convoqué sur la question.

En attendant, la révolte continue de gronder, des pillards s'installent, l'insécurité commence à prendre le pas et les victimes à se plaindre des excès. Un peloton militaire français est même à pied d'oeuvre devant le consulat français pour le protéger. La société Total replie son personnel local sur la capitale.