Pyongyang se prépare à lancer un missile longue portée dans l'espace

La question posée par l'engin spatial coréen ravive une fois encore les tensions internationales.

Pyongyang se prépare, en effet, à propulser un missile à longue portée dans l'espace. Cet engin balistique susceptible d'atteindre les côtes américaines de l'Alaska est particulièrement redouté à la fois par les pays voisins, le Japon et la Corée du Sud, mais aussi par les Etats-Unis et le Canada.

Le lancement étant prévu entre le 4 et le 8 avril prochain, la Corée du Nord a déjà avisé l'Organisation de l'aviation civile internationale et l'Organisation maritime internationale des points de chute des propulseurs. Le premier tomberait en mer du Japon, du côté nord, et le second dans le Pacifique entre Hawaï et le Japon.

Pyongyang précise que ce tir est destiné à mettre sur orbite un satellite de communication. Mais Washington, Seoul et Tokyo craignent qu'il ne masque en réalité la propulsion d'un missile à usage militaire pour vérifier ses capacités d'atteindre un objectif situé à une distance très lointaine.

Aussi, une levée de boucliers est d'ores et déjà mise en branle, les trois ou quatre capitales n'acceptant pas d'être prises de court comme cela s'est produit autrement avec le lancement récent du missile iranien. En retour, Pyongyang met en garde contre toute manipulation de l'ONU pour lui imposer des sanctions. Il mettrait tout simplement fin aux négociations visant sa dénucléarisation.

On prête, bien sûr, à la Corée du Nord l'intention d'exercer ainsi un chantage, sur les Américains notamment, pour activer l'octroi des aides promises.

Le Japon s'interroge en même temps sur la possibilité d'arrêter dans sa course le missile coréen au-dessus de son espace aérien.

Si Pyongyang soutient toujours qu'il a envoyé un satellite dans l'espace et non un missile, les Occidentaux prétendent, eux, le contraire, en brandissant la menace de sanctions à faire prendre à son égard par le Conseil de sécurité.

D'ailleurs, c'est à ce sujet qu'une réunion de ce dernier a été diligentée hier, en toute hâte, pour en débattre.

Jusqu'ici, toutefois, grâce au veto de la Chine et de la Russie, le Conseil n'a pu adopter une résolution quelconque s'inscrivant dans la visée des Occidentaux et de Séoul.

Moscou et Pékin, en refusant de suivre ces derniers, préfèrent souscrire à une résolution moins contraignante, pour ne pas mettre fin au processus de négociation entamé avec la Corée du Nord pour sa dénucléarisation.

Les deux capitales estiment qu'il est contre-productif d'acculer ce pays à ses extrémités, d'autant plus qu'il compte désormais parmi les puissances nucléaires.

Un article remarquable publié par Marianne donne plus de lumière quant à la détermination abusive de l'Occident et du Japon de se réserver la conquête de l'espace en une espèce de chasse gardée. Se référant à un traité vieux de trente ans, l'auteur met en lumière le gros mensonge avancé et développé par sa presse pour écarter la Corée du champ des recherches spatiales. Le voici, en entier, à l'attention des lecteurs de Thilelli :
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Lancer coréen, humiliation américaine, alignement français

La fusée lancée par la Corée du Nord démontre la fragilité des puissances occidentales quand une nouvelle nation s'invite dans une chasse gardée, l'Espace. Premier signe, en tout cas, de l'alignement de la France de Sarkozy sur les Etats-Unis ?

La bronca internationale soulevée par le lancement d’une fusée par la Corée du Nord cache d’autres enjeux, au premier rang desquels, la lutte sans merci pour la souveraineté de l’espace. Dans la convention internationale en vigueur, deux principes fondamentaux sont établis. D’une part, la liberté d’accès et d’utilisation et d’autre part, la non appropriation de l’Espace.

Une propagande nippo américaine ?

En demandant une réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’Onu dans l’après-midi de dimanche, en raison de la violation d’une résolution de 2006 interdisant à la Corée du Nord de procéder à des tirs balistiques (résolution n°1718), le Japon et les Etats-Unis ont tenté d’assimiler le lancer d’une fusée nord-coréenne à un tir balistique. De facto, leur objectif était d’obtenir une condamnation par principe de la société internationale, incarnée par l’Onu. La rhétorique est claire et ne prête pas à confusion, du moins a priori.

Comment expliquer alors que cette condamnation ne vienne pas ? Le motif invoqué pour condamner la Corée du Nord était biaisé dès le départ, et les Nations Unies ont estimé le plus sérieusement du monde que les allégations nippo-américaines étaient non fondées. C’est précisément cette deuxième option qui semble la plus probable.

Un alignement problématique de la France

La « relation spéciale » qui unit le Royaume-Uni et les Etats-Unis nous a habitués à voir la patrie de Shakespeare s’aligner sans réflexion aucune, ni sans nuances, sur la position américaine. Pour preuve, les conflits en Afghanistan et en Irak. Ce qui interroge cependant, c’est cet acharnement de la France représentée par Sarkozy à vouloir chiper la place de « premier de la classe » aux voisins d’outre-manche.

Sans aller dans la remise en cause des dires américano-japonais, c’est-à-dire sans prendre pour argent comptant tout ce que peut dire l’Oncle Sam, l’acception est de mise, la France aurait pu faire preuve de nuance dans son positionnement en attendant une vérification des faits. C’eût été méconnaître le tropisme transatlantique de Nicolas Sarkozy, un tropisme encore réaffirmé au moment du G20.

La France hors-la-loi !

En appelant à condamner le lancer de fusée nord-coréen, le suivisme de la France l’a donc mis en porte-à-faux d’une convention internationale pourtant ratifiée depuis près de 30 ans (5 août 1970). Au même titre que toutes les nations qui composent l’Onu, la Corée du Nord a le droit à l’exploration de l’espace, qui n’appartient à personne, qui n’est la chasse gardée de personne, n’en déplaise à Obama et Sarkozy. Car c’est bien pour préserver leurs intérêts particuliers que les dirigeants occidentaux se sont offusqués de l’initiative nord-coréenne.

Si, dans les textes, la souveraineté de l’espace n’est jusqu’ici pas arrêtée, il n’en est pas moins clair qu’un lancer nord-coréen vient troubler un pré-carré resté longtemps des deux rives de l’Atlantique. À cela, il devient simultanément nécessaire de préciser qu’il serait bien naïf de croire que la Corée du Nord puisse arriver toute seule à défier avec tant d’aplomb l’hégémonie américaine. L’appel à la retenue annoncé fièrement par la Russie et la Chine à la sortie d’un Conseil de sécurité vécu comme dramatique par les puissances occidentales – et les médias occidentaux en sus – en dit long sur le danger que pourrait représenter la Corée du Nord pour ses voisins les plus proches, la Russie et la Chine, en l'occurrence.

Les inquiétudes des Etats-Unis, du Royaume-Uni, du Japon et de la France sont légitimes. Il est clair que le temps d’une superpuissance, comme l'a décrit Hubert Védrine, ou même d’un multilatéralisme occidental dominant, est bien fini. L’enjeu de la souveraineté spatiale en est une démonstration des plus claires. Entre une guerre froide régénérée qui opposerait des blocs distincts, les Etats-Unis avec la Chine ou la Russie, n’est-il pas urgent d'explorer une troisième voie ?

Mardi 07 Avril 2009
Cédric Omet

Par une déclaration faite, hier lundi, le Conseil de sécurité a condamné la Corée du Nord pour son tir de fusée balistique effectué le 6 avril, un tir qu'il considère en infraction de la résolution prise en 2006 à la suite de son premier essai nucléaire.

Cette déclaration, non contraignante, demande à Pyongyang de ne plus procéder à de nouveaux tirs. Elle l'invite également à reprendre au plus tôt, avec les cinq pays suivants : le Japon, les USA, la Russie, la Chine et la Corée du Sud, les négociations portant sur sa dénucléarisation. Sur un autre plan, elle renforce les sanctions en vigueur, en procédant cette fois, d'ici à la fin avril, au gel des avoirs financiers détenus à l'étranger par des entreprises nord-coréennes.

Contre cette avalanche d'exigences, Pyongyang répond par une fin de non-recevoir. Son ministre des Affaires étrangères rejette d'abord la déclaration en question. Il déclare également que son pays laissera en suspens sa participation aux négociations de dénucléarisation, et qu'il se propose, enfin, de poursuivre son développement au double plan nucléaire et spatial.

Seule la Russie a réagi jusqu'ici, en la regrettant, à la décision de Pyongyang. Tout comme la Chine, elle l'invite à poursuivre les négociations sur la dénucléarisation. Le Japon, lui, exige fermement le retour de la Corée du Nord à ces négociations.

En quelque sorte, c'est un nouveau bras de fer auquel a abouti la déclaration du Conseil de sécurité, qui, encore une fois, ne revêt pas les formes d'une résolution contraignante.

L'Agence internationale de l'Energie atomique vient de déclarer, depuis Vienne, en Autriche, que Pyongyang a expulsé les inspecteurs de l'AIEA et décidé aussi de réactiver toutes ses installations nucléaires.

La Corée du Nord considère injuste la déclaration adoptée hier en sa défaveur par les quinze membres du Conseil de sécurité de l'ONU.

Pyongyang persiste toujours à considérer qu'il a envoyé dans l'espace, le 5 avril dernier, un satellite de communications, ce que démentent les USA qui croient avoir identifié plutôt un tir de missile balistique intercontinental pouvant atteindre leur territoire.

D'après les observations du Japon, la fusée n'aurait jamais atteint ses objectifs puisque son premier étage se serait écrasé dans ses eaux et le second un peu plus loin hors de sa zone.

Pyongyang menace d'expérimenter un nouvel essai nucléaire et de tester un autre missile balistique, si le Conseil de sécurité ne lui présente pas des excuses pour les sanctions prises abusivement à son endroit. C'est en tout cas le sens du communiqué publié par l'agence officielle de presse, KCNA. "Dans l'éventualité où le Conseil de sécurité ne formulerait pas d'excuses immédiates, la République populaire démocratique de Corée serait contrainte de prendre de nouvelles mesures d'autodéfense afin de défendre ses intérêts suprêmes", explique le ministère nord-coréen des Affaires étrangères.

Au terme des sanctions récemment prises contre trois entreprises nord-coréennes ayant collaboré aux programmes nucléaires et balistiques de Pyongyang, il a été décidé de les inscrire sur une liste noire qui permet le gel de leurs avoirs à l'étranger.

Le Japon se dit très préoccupé par l'attitude de la Corée du Nord, mais il ne veut pas envenimer les choses. "Il est important d'avoir une coopération étroite afin de persuader la Corée du Nord de reprendre les pourparlers", a déclaré l'un de ses représentants accompagnant le Premier ministre en visite à Pékin.

Un analyste chinois estime, lui, que "la Corée du Nord veut devenir une puissance nucléaire et pour y parvenir, davantage d'essais nucléaires sont nécessaires. Un essai nucléaire ne suffit pas. Il y en aura d'autres, de même pour les tests de missiles." En d'autres termes, Pyongyang a besoin de poursuivre ses activités nucléaires pour s'affirmer dans la cour des grands.